top of page
ruedutheatre

Merveille : aux mères veilleuses, à leurs enfants

Pas de textes, pas de dialogues, pas de confrontation, pas d’ostentation pour dénoncer, une fois de plus mais jamais une fois de trop, les violences intraconjugales. Un sujet qui ne date pas d’aujourd’hui traité d’une manière novatrice.

 

Première image qui sera aussi la dernière : sur le sol d’une spacieuse cuisine aux lignes épurées, avec tout le confort qui se doit et vue sur l’extérieur, un corps en position fœtale. Entre un personnage éblouissant par sa tenue sortie de la garde-robe d’une drag-queen et merveilleux par sa baguette empruntée à une fée du logis qui, par magie, réanime ce corps sans vie. La magie s’arrête là.

 

C’est un quotidien plus que banal qui nous est alors relaté. Une mère à qui incombent les tâches ménagères telles que rangement, vaisselle, repassage,…tandis que le père se détend dans une autre pièce et que le bébé dort. Ne pas faire le moindre bruit. Bien sûr pour éviter de réveiller ce petit être innocent et dépendant mais surtout pour ne pas éveiller les soupçons de ce qui se trame dans la tête de cette femme terrorisée ne pensant plus qu’à une seule chose : partir avec son enfant.

Aucun mot n’est prononcé ; les seuls courts échanges du couple pour savoir qui des deux va se rendre à la crèche se font par sms. Pourtant la tension, la peur, la violence mais également la volonté d’agir pour ne plus subir sont plus que palpables au sein de ce foyer. C’est uniquement par le corps, par la gestuelle que toutes ces émotions parviennent à toucher et sensibiliser le public. Amandine Laval est impressionnante par sa maîtrise corporelle. Chacun de ses gestes qui, dans l’absolu, relève de l’ordinaire comme ramasser un jouet, essuyer une casserole, boire un verre d’eau, déclenche chez le témoin, chez nous, une pensée, une phrase. Bouleversant ce passage du physique de l’interprète à l’intellect du spectateur.

 

Une représentation quasi sans parole qui, non seulement, parle, montre, dénonce ce qui ne se voit pas mais qui est également une intéressante leçon de théâtre. Déjà par la multitude de signes scéniques à décoder à chaque instant. Que se soit une plante qui tombe, une lampe qui s’allume ou s’éteint, une porte ou une poubelle qui se ferme,…Mais aussi parce que, pour la dernière scène, Jeanne Dandoy, fait appel, une semaine avant la représentation, à une douzaine de quidams. Un tableau qui n’est donc pas figé dans le temps, change en fonction du lieu. Une belle aventure, une ouverture essentielle.

 

Il est cependant un rien regrettable que les trois chansons, judicieusement choisies, interprétées en direct par Jean Fürst dans cette pièce extrêmement forte pour le fond et cohérente pour la forme, soient en anglais. Comme quoi, la perfection n’est pas de ce monde même si c’est pour suggérer l’universalité du sujet traité.

 

Isabelle SPRIET

Mons, 13 novembre 2024

 

Texte, Dramaturgie, Mise en scène : Jeanne Dandoy, Cie SERIALLILITH

Jeu : Jean Fürst, Amandine Laval

Scénographie : Amber Vandenhoeck

Chorégraphie, voix off, effets spéciaux : Jos Baker

Photo : Hubert Amiel

Production et diffusion : Valentine Siboni

46 vues

Posts récents

Voir tout

Comments


bottom of page