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Patrick Chesnais ou l'art de l'excuse

"Lettres d'excuses" au théâtre Actuel, à 19 h 40


Un homme seul. Face à lui-même, à sa vie d'homme et à sa carrière de comédien. Et l'écriture comme quasi passage obligé.


Patrick Chesnais a sauté le pas l'an dernier, avec cette envie irrépressible de composer des lettres "aux personnes que j'aime ou que j'ai aimées". Missives vite devenues, couchées sur le papier, des lettres d'excuses. Et aujourd'hui sur une scène de théâtre des envolées d'émotions.


Déployant sa longue silhouette, d'un lutrin à un bureau, feuillets en mains, Patrick Chesnais, voix rocailleuse, met à nu ses faux pas involontaires, ses nostalgies, ses exagérations, ses petites joies et lâchetés et sa douleur immense, dévastatrice. Celle de la perte, en 2006, de Ferdinand, son fils de 20 ans, "je m'excuse de ne pas t'avoir protégé, de ne pas pouvoir t'admirer grandir".  Sans grandiloquence et sans pathos, le comédien nous cueille sur le vif.

Des excuses, il en a à revendre,  mais loin de toute disculpation ou dérobade. Il y a là tout son compte de piques irrévérencieuses, de drôlerie, de sagesse et de tendres affections. Pour sa mère, au seuil de sa vie, dans cette maison, "où on attend, où on bat en retraite, où on attend encore". Pour Mémé de La Garenne, "petite main couturière". Pour la sublime Delphine Seyrig. Pour la toute jeune Mathilda May, "encore fragile et hésitante" qu'il abandonna un soir de représentation sur la scène de théâtre, pour lire dans sa loge une critique du Canard Enchaîné.


Des excuses, Patrick Chesnais en assène également à sa jeunesse, son temps de "soldat du jeu,  buveur-cueilleur de vie". A sa vieillesse et à cette foutue prostate "qui grossit, marqueur d'une grande maturité"; A l'île de Ré, à Paris "insupportable mais indispensable", qui le tient dans ses filets.  Et enfin à lui-même, "je connais tout, excepté moi-même". Pour finalement avouer : "les motifs de s'excuser sont infinis. Mais suis-je si coupable ? C'est sûr j'aurais pu faire mieux, mais bon j'ai fait ce que j'ai pu, plus ou moins bien".  Coupable il l'est assurément, d'être l'auteur de lettres si joliment troussées.


Chantal MALAURE

Avignon, 8 juillet 2024

Photo Emmanuel Faure

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