Evanescence mémorielle
- ruedutheatre
- il y a 6 jours
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COUP DE CŒUR DE LA REDACTION
Festival Off 2025 – Anatomie d’une actrice– Théâtre du Roi René -11h55
« Anatomie d’une actrice » entraine le public dans la violence feutrée d’une mémoire qui s’étiole. Un spectacle aussi beau qu’émouvant. Aussi esthétique que profond. Sobre et poignant. Sublime.
L’écrin intime d’une loge de théâtre, à quelques souffles de l’entrée en scène. Deux comédiennes se préparent. Maquillage, répétitions des tirades clés. Trac. Puis la mémoire qui vacille, les mots qui se dérobent. L’entraide et les confidences entre l’artiste affirmée la comédienne débutante. Liées par des fils invisibles qui se tisseront durant toute la représentation. Deux femmes, deux âges. Deux parcours imperceptiblement liés. Qu’Hélène et Lola Zidi feront vibrer avec une infinie délicatesse et pourtant avec force durant toute la pièce.
Car tout est ici puissant. A commencer par le jeu des comédiennes. Elles donnent vie, corps, colère, peurs et espoirs à leur personnage. Tantôt avec retenue, tantôt avec panache. Toujours avec profondeur. Elles les font vibrer sur le fil des émotions, sans tomber dans le moindre pathos. Brillant. Jusque dans les regards absents.

Puissance aussi dans la scénographie et la mise en scène, qui se jouent des ombres, des reflets de lumières et des transparences. En écho sobre et subtil à la dramaturgie. Comme pour souligner la lente dissolution du réel dans les méandres de la mémoire. Puissance enfin dans le texte qui entrelace subtilement les temps et construit le fil d’une histoire qui se délite. Soulignant la cruauté de l’effacement et la force inouïe de l’attachement.
Impossible de ressortir indemne de cette pièce, où les éclats de rires s’érigent sur les failles de la mémoire. Où les souvenirs s’échouent sur des réalités tronquées. Où la violence de l’oubli espère la douceur d’une réminiscence. Aussi fugace soit elle. On assiste moins à l’anatomie d’une actrice qu’à celle d’un passé. Une tentative de reconnexion, par le théâtre, entre deux vies. Et où la route tracée par l’inexorable maladie, laisse encore place à quelques chemins de traverse.
Une pièce qui fait écho au vécu ou aux craintes de chacun. Une pièce que l’on aborde par le rire et que l’on quitte en larmes. Bouleversés par toute la puissance, toute la vérité, toute la beauté de la partition qui nous a été offerte. Douloureuse. Et magnifique.
Karine PROST
Avignon, 25 juillet 2025
Photo © Julien Jovelin
Texte et mise en scène : Hélène Zidi, Lola Zidi
Avec : Hélène Zidi, Lola Zidi
Son : Alain Governatori
Lumière: Denis Koransky
Scénographie : Jean-Michel Adam
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